La fièvre charbonneuse (FC) (ou charbon bactéridien) est une maladie infectieuse d’origine tellurique affectant les mammifères, principalement les herbivores, et transmissible à l’Homme, due à une bactérie : Bacillus anthracis.

Chez les animaux, elle se présente généralement sous la forme d’une maladie aiguë, septicémique, évoluant rapidement vers la mort avec des symptômes généraux, circulatoires, digestifs et urinaires. Les lésions principales sont celles d’une septicémie hémorragique associée, en particulier, à une hypertrophie et un ramollissement de la rate, et une modification de l’aspect du sang devenu noir et incoagulable.

Maladie tellurique incrustée dans certaines régions, susceptible de provoquer des pertes importantes par mortalité du bétail, mais souvent jugulée par la pratique de la vaccination.

Importance hygiénique : zoonose grave transmise à l’Homme essentiellement par piqûre accidentelle

Malgré sa faible incidence sur le bétail en France, son importance hygiénique, justifie son inscription en tant que danger sanitaire de 1ère catégorie.

ESPÈCES INFECTÉES

  • toutes les espèces de mammifères, domestiques ou sauvages ;épidémiologiquement, les plus exposées sont les herbivores, en particulier les ruminants (notamment bovins et ovins).
  • les carnivores nourris avec des viandes infectées (fauves de ménagerie, visons, carnivores domestiques…) ;
  • se transmet à l’Homme (contamination cutanée, digestive ou respiratoire) : zoonose grave.

Étude clinique

INCUBATION : 4 à 8 jours en moyenne (minimum : 2 j; maximum : mal déterminé environ 15 j

SYMPTÔMES

Bovins et Petits ruminants

Forme (sur)aiguë : charbon septicémique

  • Atteinte brusque de l’état général avec frissons, élévation thermique (41-42°C), arrêt de la sécrétion lactée.
  • En 12 à 24 heures : développement de troubles respiratoires et circulatoires (dyspnée, accélération du rythme cardiaque, congestion puis cyanose des muqueuses et parfois ecchymoses), éventuellement digestifs (coliques et diarrhée avec selles sanguinolentes, épreintes, ténesme) et plus tardivement urinaires (“pissement de sang”) :
  • La mort survient en 2 à 3 jours

Formes subaiguës : charbon “externe” ou charbon “à tumeur”.

  • Il débute par une réaction œdémateuse atteignant en quelques heures 20 à 30 cm de diamètre, chaude, douloureuse, non crépitante, localisée le plus souvent à la gorge ou l’entrée de la poitrine.
  • Développement rapide de symptômes identiques à ceux de la forme aiguë et mort en 4 à 5 jours (guérison rare).

Formes frustes :

  • atteinte fébrile transitoire

Chevaux

· Mêmes symptômes que les bovins avec deux particularités :

  • importance des symptômes digestifs (coliques fréquentes et précoces, entérite hémorragique)
  • évolution moins rapide (mort en 3 à 6 jours).

Suidés (plus résistants) :

Formes septicémiques, peu fréquentes

Forme classique (angine charbonneuse) :

  • Débute par une tuméfaction œdémateuse de la gorge (s’étendant à la face),
  • Suivie rapidement de fièvre, dyspnée,
  • Troubles circulatoires,
  • Diarrhée (parfois hémorragique)
  • Lésions cutanées congestives ou hémorragiques.
  • Mort en 2 à 4 jours. Guérison possible

Carnivores :

  • Symptômes généraux
  • Septicémie hémorragique
  • Peut débuter par une tuméfaction œdémateuse de la gorge (œdème du pharynx et de la langue).
  • Rapidement mortelle ;

Lésions (identiques chez toutes les espèces)

Lésions essentielles :

  • Sang noirâtre, épais, poisseux, incoagulable,
  • Rate hypertrophiée (parfois x 5), globuleuse, noirâtre, flasque, fragile, avec pulpe de consistance boueuse (“sang de rate”) (cette lésion est parfois absente).
  • Vessie avec urine sanguinolente, congestion rénale intense.
  • Intestin congestif ou hémorragique (surtout duodénum).
  • Tumeur charbonneuse : œdème gélatineux et ambré entourant un groupe ganglionnaire interne

(nœuds lymphatiques mésentériques en particulier) ou externe (gorge, entrée de la poitrine) hypertrophié, hémorragique et nécrosé.

Autres lésions :

  • Congestion généralisée (poumons, nœuds lymphatiques ….), carcasse d’aspect fiévreux et foncée, sans rigidité cadavérique, pétéchies cardiaques.

NB- Noter l’altération rapide du cadavre susceptible de modifier les lésions et de rendre difficile l’isolement de B. anthracisdont la forme végétative est rapidement inhibée.

Bovin, ganglion lymphatique. Le nœud est hyperémique et contient plusieurs foyers sombres d’hémorragie

Epidémiologie

Sources de germes:

Permanentes :

  • Sol contaminé par les spores provenant des animaux malades ou leur cadavre.
  • Le sol constitue le véritable réservoir de la maladie (réservoir hydro-tellurique).

Occasionnelles :

  • Les animaux et leurs produits.
  • Chez les malades, le sang et tous les tissus sont virulents (septicémie),
  • Les excrétions
  • Le lait peut être contaminé en phase clinique tardive, (ni à la multiplication de la bactérie, ni à sa sporulation). Malgré cela il est indiqué de détruire le lait des animaux malades. Il est aussi conseillé de pasteuriser le lait des animaux du troupeau
  • Pas de portage chronique.

Le danger est surtout représenté par le cadavre et toutes les parties qui en dérivent (viscères, viandes, os, peaux, phanères).

Transmission :

Le plus souvent indirecte :

  • Ingestion d’aliments (herbe… ) souillés par de la terre polluée ou des aliments bétail préparés à partir de matières premières contaminées, consommation par les carnivores de viandes infectées.
  • Par piqûre (rôle possible d’insectes hématophages notamment les tabanidés, objets souillés) ou contamination d’une plaie.

Rôle du nombre de spores ingérées. Possibilité d’infection inapparente avec immunité occulte dans les zones d’enzootie.

Quel est le risque de contamination de l’Homme ?

Chez l’Homme, contamination sont possibles :

  • cutanée (de loin la plus fréquente),
  • intestinale (ingestion de produits issus d’animaux infectés) ,
  • pulmonaire.

Critères de suspicions (pour INFO – Soumis à la décision de la DDCSPP)

  • Maladie aiguë fébrile, d’allure septicémique et asphyxique, avec hématurie et éventuellement “tumeur” non crépitante centrée sur un groupe ganglionnaire (charbon externe), mortelle en 2 à 3 j en moyenne.
  • Sur un cadavre: tumeur gélatineuse, rate hypertrophiée et boueuse, sang noir et incoagulable, congestion des nœuds lymphatiques, congestion intestinale et hématurie (attention les lésions sont rapidement modifiées par une putréfaction précoce). Présence éventuelle d’exsudats hémorragiques des orifices naturels.
  • Et d’un point de vue général, toute mort brutale (ruminants et équidés), en particulier en cas d’observation d’écoulements hémorragiques des orifices naturels, survenant notamment en zone à risque (“régions à charbon”).

NB : En cas de suspicion, et si l’autopsie s’avère nécessaire, elle doit être pratiquée dans un lieu aisément nettoyable et désinfectable (établissement d’équarrissage par exemple). Il convient en outre de prendre les précautions d’usage pour éviter une contamination humaine lors de la manipulation du cadavre et l’autopsie.

Conduite à tenir

Le vétérinaire sanitaire soulevant une suspicion clinique de fièvre charbonneuse doit :

  • Établir un diagnostic différentiel sur une base clinique et épidémiologique et en conserver une trace écrite afin d’étayer l’expertise ;
  • Contacter la DD(CS)PP ;
  • Informer l’éleveur des mesures de biosécurité qu’il convient d’adopter :
    • protection personnelle en évitant les contacts inutiles avec les animaux et en se protégeant (port de gants) ;
    • protection des animaux : isolement des animaux malades ou morts ; limiter autant que
    • possible les déplacements des animaux au sein de l’exploitation (entre pâtures, bâtiments) o protection de l’environnement : éviter les effusions de sang ;
  • Réaliser, dans le respect des mesures de biosécurité, les prélèvements ;
  • Traiter éventuellement par antibiothérapie les animaux malades.

Diagnostics différentiels

Avec toutes les maladies rapidement mortelles telles que :

chez les bovins et petits ruminants :

  • Mort par fulguration,
  • Charbon symptomatique,
  • Septicémies gangreneuses
  • Intoxications par chlorates ou nitrates et par certaines plantes (fougère aigle, mercuriale…), etc.

chez les équidés :

  • Mort brutale,
  • Clostridioses intestinales,
  • Salmonellose septicémique,
  • Coliques,
  • Intoxications, peste équine, anémie infectieuse, piroplasmose, etc.

Prélèvements (pour INFO – Soumis à la décision de la DDCSPP)

A – Nature des prélèvements chez les animaux :

Prélever plusieurs animaux malades et réaliser, (si possible) des prélèvements de nature différente. Les prélèvements doivent être réalisés avant la mise en œuvre de l’antibiothérapie.

  • Sang sur animal vivant fébricitant (10 ml sur tube sec) ainsi que du lait pour les bovins laitiers (5 à 10 ml sur tube sec) ;
  • Rate ou un prélèvement de rate (40 à 50 g dans une boîte sèche à conserver au froid à 4C), éventuellement un prélèvement de foie et du poumon si les conditions d’autopsie le permettent ;
  • Muscle (lorsque les organes internes ne sont pas disponibles) ;
  • Le cas échéant, autres prélèvements à la demande du LNR.

B – Conditionnement des prélèvements :

Il convient que le conditionnement des prélèvements respecte des règles de biosécurité contenu de la dangerosité potentielle de ces prélèvements. Le principe est de s’assurer de l’étanchéité du colis au moyen d’un triple emballage dont les premiers niveaux sont étanches.

Consignes / Biosécurités (pour INFO – Soumis à la décision de la DDCSPP)

La collecte des éventuels cadavres par l’équarrisseur doit être spécifique (au préalable, le cadavre sera retiré rapidement du reste du cheptel et sera protégé des contacts avec les autres animaux sensibles). (voir DDCSPP).

Attention aux opérateurs exposés à un risque de contamination de la nécessité de réaliser des opérations de nettoyage-désinfection : véhicule, matériels de surface.

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